Le lundi 25 mars dernier, mon mari a enfilé une chemise qu’il avait récemment achetée et s’est rendu compte qu’elle avait rétréci au lavage. En regardant l’écart entre les poignets de la chemise et les siens, j’ai réalisé qu’une fois de plus, je n’avais ni consulté ni respecté les instructions de lavage.
Ce même jour, le Conseil Européen s’est réuni pour discuter des déchets textiles et de leurs effets sur l’environnement (+ d’infos ici). En effet, je n’étais pas la seule personne à réfléchir à comment éviter de jeter des vêtements à ce moment-là…
Les dégâts
Il se trouve que la Commission Européenne dispose de nombreuses informations sur la quantité de vêtements que nous gaspillons et sur la pollution qu’ils engendrent. Les chiffres sont stupéfiants, même si l’on ne tient pas compte de ceux des pays non membres de l’UE.
Par exemple :
« 5 millions de tonnes de vêtements sont jetés chaque année dans l’UE, soit environ 12 kg par personne.”
« …environ 78% des déchets textiles post-consommation… ne sont pas collectés séparément et finissent dans les déchets ménagers mélangés, destinés à être incinérés ou mis en décharge. »
“On estime que la production textile est responsable d’environ 20 % de la pollution mondiale d’eau potable, à cause des teintures et autres produits de finition.”
« Seulement 1% des vêtements usagés est recyclé en vêtements neufs.”
Earth.org indique également qu’à l’échelle mondiale, l’équivalent d’un camion à ordures rempli de vêtements est déversé dans une décharge toutes les secondes.
Ces statistiques sont étroitement liées à l’industrie de la fast fashion (un terme rappelant le concept du fast food, et qui veut dire “mode rapide”), responsable de la production de vêtements de mauvaise qualité et à très bas prix. Les gens achètent et jettent leurs vêtements à un rythme croissant. “Le nombre de fois qu’un vêtement est porté a diminué d’environ 36 % en 15 ans » constate le Programme des Nations unies pour l’environnement.
Compte tenu de ces faits, le recyclage peut sembler une solution évidente. Mais pour diverses raisons, dont le manque de ressources, il n’est actuellement pas possible de traiter les quantités de vêtements jetées, même s’ils étaient correctement triés. Un grand pourcentage des vêtements déposés dans les conteneurs ou chez des associations caritatives sont éventuellement exportés vers des pays du tiers-monde en raison de l’insuffisance des programmes de recyclage. Certains vêtements sont effectivement réutilisés grâce à ces transferts, mais la plupart d’entre eux sont déversés illégalement dans des endroits comme Accra, au Ghana.
Selon un article d’ABC News (à retrouver ici), « quelque 15 millions de vêtements usagés arrivent chaque semaine à Accra en provenance du Royaume-Uni, d’Europe, d’Amérique du Nord et d’Australie… » Ils sont vendus aux vendeurs des marchés locaux et, en raison de l’état et de la qualité des vêtements, seul un petit pourcentage est vendable. Le reste est déversé dans un site non-officiel comme celui présenté ci-dessus, mettant en danger à la fois la population locale et l’environnement. Les plages et les océans environnants sont de plus en plus pollués par les textiles et leurs matières dangereuses, notamment les microplastiques.
Les actions en cours
Heureusement, comme je l’ai déjà mentionné, des efforts politiques combinés sont déployés pour trouver et mettre en œuvre des solutions dans toute l’Europe. Le Conseil européen envisage d’imposer une taxe aux marques de fast fashion afin de réduire leur marché en Europe et de financer les coûts de recyclage. Il discute également de la manière d’adapter les systèmes de recyclage afin qu’ils soient plus pratiques et plus efficaces. Enfin, la France, le Danemark et la Suède s’attaquent spécifiquement à l’exportation de textiles usagés vers les pays du tiers-monde, appelant à des « contrôles plus stricts ».
Certains acteurs dans l’industrie de la mode se sont également efforcés de promouvoir un système plus durable. Certaines marques proposent des programmes de réparation en interne, comme Sessile, Patagonia et H&M. D’autres (e.g. JanSport, Sloggi, Balibaris) se concentrent simplement sur la « durabilité », en créant des articles de haute qualité, exempts de matériaux nocifs pour l’environnement ou qui compliquent le recyclage des textiles.
Les organisations qui travaillent localement et à l’étranger pour nettoyer les déchets textiles et réduire leur impact sur l’environnement sont toutes d’accord sur un point : nous devons repenser nos garde-robes. Comment devenir des consommateurs plus responsables, tout en restant à la mode ?
5 astuces simples pour s’améliorer
- Réparer les vêtements que vous avez déjà. Si vous préférez faire les choses vous- même, vous trouverez en ligne de nombreuses instructions de réparation peu coûteuses. Pour ceux d’entre nous qui sont occupés ou qui n’ont pas de machine à coudre en état de marche, vous pouvez simplement trouver un atelier de réparation local et payer un professionnel pour faire le travail. Les Réparables est un site web qui vous permet de « commander » des réparations depuis votre domicile. C’est pourquoi l’association française Refashion a créé un « bonus réparation » en 2023. Ce bonus peut réduire le coût d’une réparation de 7 à 25 euros selon le type de réparation.
- Prenez soin de vos vêtements (mon gros point à travailler !). Il n’est jamais inutile de se renseigner sur les produits que l’on achète. De nombreuses marques proposent des conseils de nettoyage et d’entretien sur leur site web. Les étiquettes de tous les vêtements comportent des instructions de lavage qui, je l’ai appris personnellement, ne sont pas de simples suggestions ! Cela vaut la peine de prendre le temps de les lire et de classer son linge par catégories avant de commencer à le laver.
- Acheter d’occasion. Il n’est pas toujours facile de trouver des types de vêtements spécifiques de cette manière, mais c’est excellent pour trouver des vêtements uniques et vintage. Les acheteurs de fripes chevronnés peuvent trouver des pièces de très grande qualité pour seulement quelques euros. Cela demande du temps et de la motivation, mais cela peut être très gratifiant !
- Achetez des vêtements neufs de bonne qualité. Pour les vêtements dont la taille est très spécifique ou les basiques qui seront portés presque tous les jours, c’est peut-être la meilleure option. Ces types de vêtements ont tendance à durer plus longtemps et permettent donc d’éviter les achats et les remplacements fréquents. En cas d’usure, c’est aussi plus envisageable de payer une réparation lorsque le coût initial était plus élevé.
- Ne laissez pas ces publicités vous dire ce qui vous rendra heureux ou épanoui ! La mode rapide est financée par la diffusion d’idées telles que « Vous serez heureux et populaire si vous achetez ces chaussures et adoptez ce style ». Les vêtements ne peuvent que compléter notre être intérieur, pas le remplacer, et ils ne déterminent certainement pas notre valeur. La quête de sens et d’estime de soi est très humaine, et si vous voulez nos conseils pour savoir où chercher en premier, consultez notre article « Tous des Jocondes » (Indice : ça ne s’achète pas!).
Sources :
- https://earth.org/
- https://www.unep.org/news-and-stories/story/putting-brakes-fast-fashion
- https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-7725-2024-INIT/en/pdf
- https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-7881-2024-INIT/en/pdf